La douce musique du carillon retentit dans la boutique quand James en poussa la porte. Il s’essuya rapidement les pieds sur le petit paillasson avant de se diriger vers le petit escalier, ignorant le présentoir qui faisait directement face à l’entré. Dessus, était disposé les derniers best-sellers et livres qu’il fallait obtenir à tout prix. Mais ce n’était pas cela qui intéressait le garçon, ni le dernier Sorcière Hebdo qui trônait sur la petite basse à droite de la rampe d’escalier qui montait vers la petite mezzanine. Il grimpa rapidement les marches, avant de tourner sur la gauche. Son rayon de prédilection. Celui de Médicomagie. Le mois de Septembre était déjà bien entamé, et cela faisait déjà deux bonnes semaines que James avait commencé sa formation. Dans l’ensemble, il en était plutôt frustré. Certes il apprenait, doucement mais sûrement auprès de ses tuteurs et pendant ses missions. Mais ce n’était pas assez rapide à ses yeux. Et surtout pas assez poussé. Il se rongeait le frein. Attendait les cours avec impatience, mais rien à faire. Il était en première année. Il était aussi inutile qu’avant. Il voulait sauver des vies lui par Merlin. Pas attendre de finir gentiment sa formation et regarder les patient de Sainte-Mangouste atteints de Dragoncelle mourir. Aussi forte qu’était sa frustration, il réussissait à la contenir. En partie grâce à Marie-Ange, une chouette fille. Il l’avait apprécié à Poudlard, l’appréciait encore plus maintenant.

Et la nuit, au lieu d’enchaîner cauchemar sur cauchemar et de s’énerver sur son incapacité, James dévorait tous les livres qui lui tombaient sous la main pendant ses insomnies. Il était rapidement venu à bout des quelques ouvrages présents chez lui, et bien vite, le besoin de nouvelles lectures l’avait poussé jusqu’au chemin de Traverse, dans cette boutique de Fleury et Bott. Avant ce n’était pas sa boutique préféré. Non, loin de là. Avant –et d’aussi loin qu’il s’en souvienne, s’il était de passage sur le Chemin de Traverse, il se serait rué à la boutique de Quidditch, découvrir le dernier ballais. Les derniers accessoires en ventes ou le dernier mensuel qui parlerait des équipes Anglaises à la recherche d’informations sur ses favoris. Que de perte de temps. Que des occupations futiles. Avant, il était jeune et insouciant. Maintenant, il était comme vieux et usé. Trop mature peut être si on pouvait l’être. Trop amère. Amère de cette vie qui se joue de tout. De ces destins maudis. Remus. Il avait déjà tant souffert. Pourquoi par Merlin lui arracher la vie si brutalement. Il ne le méritait pas... Tellement pas.

James survolait des yeux les étagères. Ses doigts effleurant les couvertures tantôt rappeuses, tantôt lisse des ouvrages. Les Blessures Noires. Un titre qui intrigua James. Il s'arrêta à son niveau et attrapant le livre à la couverture rouge, il le retourna entre ses mains, cherchant ample information à son sujet. Mais la quatrième de couverture n’était pas plus équivoque. Il l’ouvrit donc, cherchant le sommaire qui lui serait peut-être plus utile. Mais avec les trois autres livres qu’il avait déjà retenu coincé sous son bras gauche, ce n’était pas une chose facile à faire. Et malgré ses bons réflexes qu'il avait travaillé à l'école en pratiquant le Quidditch, il ne réussit à rattraper qu'un seul des trois livres quand ces derniers tombèrent dans un énorme boom. L’un d’entre eux était un livre sur les poisons les plus courants, et s'était ouvert au milieu, on pouvait y voir une belle image de chaudron mijotant. Il n’avait jamais vraiment aimé les potions. Tout le monde le savait. Sa matière favorite c’était la métamorphose. Et il n’avait jamais pensé avoir besoin de l'art des potions au quotidien, si bien qu'il n'avait pas vraiment travailler la matière. Mais ça c’était avant de s’engager dans la formation de Médicomage. Les potions en était une part très importante. Et il avait un sacré retard à rattraper et se forçait donc à les travailler dur et régulièrement. Il en allait de même les ingrédients les plus fréquemment utilisé. Chaque soir il lisait une nouvelle page et essayait de se souvenir de la précédente. Il n’avait pas fait de progrès stupéfiant actuellement, mais il avait bon espoir d’avoir un jour le déclic et devenir un as en potion. Il y croyait dur comme fer, c’était déjà ça.

Pestant contre lui même à voix basse, James se baissa pour ramasser les ouvrages qui lui avait échappé.

James se baissa doucement en soupirant. Il attrapa le premier livre, le remis sous son bras. Essayant de le caler tant bien que mal. En tout cas mieux qu’il ne l’était avant. Toujours accroupis, le garçon allait se saisir du grimoire. Celui qui s’était ouvert sous le choc. Sur la page de gauche, on pouvait voir un chaudron mijotant, sur la page de droite, c’était plutôt une  marmite rutilante qui ornementait la recette. Une recette peu ragoutante à en juger par le contenu  visqueux verdâtre contenu dans le récipient. Ça lui rappelait les essais de potions ratés. Ces préparations que James faisait dans le plus grand secret accompagné de ses amis. Ses meilleurs amis. Les Maraudeurs. Ils n’étaient plus. Plus rien qu’une bande de gamins devenus grand trop tôt. Si le souvenir des potions destinées à être utilisées en guise de méchante blague l’avait fait sourire, le souvenir de son ami défunt le fit replonger dans la tristesse quasi-permanente qui torturait son esprit.

Le garçon tira le second livre vers lui quand une voix féminine le tira de ses pensées. « Aie ! Mais c’est pas de chance je viens de ma cassé un ongle ! » « oh pardon ! » s’excusa James immédiatement en notant tout juste la présence à ses côtés. Il était tellement engouffré dans le tourbillon de pensées morbides qu’il n’avait même pas entendu ni vu la jeune femme qui venait de le rejoindre, se penchant elle aussi pour l’aider à ramasser ses livres. Et il avait tiré ce dernier d’un mouvement si brusque, qu’il avait accroché les bouts de doigts de la demoiselle.

Après avoir contemplé son ongle cassé pendant un bref instant, la jeune femme se retourna vers lui, le reconnaissant en deux secondes à peine. Il faut dire que cela ne faisait que deux mois qu’il ne s’était pas vu. Poudlard n’était pas si loin dans le fond, même si cela semblait une éternité depuis que les choses étaient arrivés. Et le garçon n’avait pas changé. Les mêmes lunettes. Les mêmes cheveux bruns in-coiffables. Bon, il avait perdu un peu de poids, mais avec sa cape et son petit pull, ça ne se voyait pas. Et la lueur d’espièglerie qui d’habitude brillait dans ses yeux, ses anciens camarades avaient eu le temps de s’habituer à son absence depuis Mai dernier.

Il fallut quelques secondes supplémentaires à Potter pour remettre un nom sur le doux visage, trop perturbé par le fait de lui avoir fait mal. Il se sentait bête et c’est d’abord une moue désolée qui orna son visage avant que ses yeux ne s’écarquillent quand son cerveau intégra enfin l’information et la reconnaisse. « James ! qu’elle bonne surprise ! Je ne m’attendais pas à te trouver ici. Surtout toi ! Mais qu’est-ce que tu deviens ? Non attend ne répond pas, allons plutôt s’asseoir quelque part et tu ma racontera ça ! »

« Greta ! » s’exclama le garçon en souriant à son tour sous le flot de ses paroles. La jeune fille était comme ça. C’était bien elle. Inchangée. Ou presque. La même bonne humeur. Le même sourire communicatif. « Bin ça alors ! » continua-t-il en se redressant et ajoutant le dernier livre à sa pile qu’il tenait fermement coincé entre son bras et son flanc. La jeune fille s’avança vers lui pour l’enlacer. De sa main libre, le garçon tapota gentiment son dos pour lui rendre son salut.
 
« Je suis sincèrement désolé, pour ton ongle ! Je ne t’avais pas vu ! » déclara le garçon en se reculant. Il ne s’était pas attendu à la voir. A vrai dire c’était encore étrange pour lui que de recroiser des camarades de classe en dehors de Poudlard. Mais Fleury et Bott était une boutique très connue et très réputée, et par conséquent très fréquentée. Puis se souvenant de la proposition de la jeune fille il continua : « oui pourquoi aller prendre un verre ! Tu me raconteras aussi !! Je suis curieux de savoir ce que tu fais maintenant ! Mais avant, je dois payer ça » dit-il en montrant du menton ses livres qu’il tenait sous le coude. Il regarda d’ailleurs le livre qui l’avait intrigué au premier abord et qu’il avait replacé rapidement sur le bord de l’étagère quand il avait fait tomber les autres. « Et je vais prendre celui-ci aussi » se laissa tenter le garçon en l’ajoutant à sa pile. Il n’était pas à quelques galions près de toute façon. Tant pis si le livre était un véritable navet ou écrit dans un dialecte étranger.

La jeune fille balaya ses excuses rapidement, permettant à James de se sentir bien vite mieux et moins coupable de sa maladresse. « Non non ce n’est rien ! Ils étaient devenue trop long de toute manière ce n’était qu’une question de temps. » Il insista une dernière fois en disant : « non, mais quand même. J’ai vraiment pas été fin pour le coup » Puis, il abandonna le sujet. Bien plus intéressant les attendait. Ils ne s’étaient pas vus depuis plusieurs mois, ils avaient d’autre chose à se dire que parler manucure et ongle cassé. D’autant que ce n’était pas du tout le sujet préféré du garçon, loin de là.

Les deux jeunes adultes quittèrent la mezzanine, foulant sur le chemin de retour le tapis de couleur aubergine. Une couleur assez hideuse aux yeux du garçon. Non, mais vraiment, pourquoi par Merlin un tapis pareil ? Il n’eut pas réellement le temps de partager son dégoût à son amie. L’escalier étant étroit, et parler l’un derrière l’autre n’étant pas chose aisée. Et puis, la couleur d’un tapis, aussi horrible soit-il n’était pas plus un sujet intéressant que les ongles cassés. James se dirigea rapidement vers le comptoir pour y régler ses achats au plus vite. Sur le bord du l’étalage, une banderole invitait les sorciers à s’approcher plus près. Une pile du dernier Roman de Goewyn Ceirwy, l’auteur à succès du moment y était exposé. Si les gens savaient que derrière la jeune femme se cachait une Métamorphomage qui usait de son don. Que ce n'était en réalité personne d'autre que Ceridwen G. Griffiths, jeune femme de 22 ans tout juste, peut être que son succès en serait tout autre. Quoiqu’elle était de la Caste des Seth après tout. Enfin, personne ne savait. James le premier. Et c’était sans doute mieux comme ça pour Elle.

James n’avait pas eu l’occasion de lire ses livres. Les romans très peu pour lui. Tout ce qui l’intéressait actuellement c’était d’apprendre le plus que possible pour devenir le meilleur médicomage d'Angleterre. « Que penses-tu d’aller prendre un thé ? À cette heure-ci je crois que nous pourrons être tranquilles pour discuter » demanda la jeune fille alors qu’ils attendaient patiemment le tour de James. Le garçon adorait le thé. Il n’était pas Anglais pour rien dans le fond. Il pouvait en boire tout le temps. Le matin, le midi, à dix ou trois heures. Avant d’aller dormir. C'était simple. Il en raffolait. C’était donc avec un grand plaisir que le garçon répondit à la positive à la proposition de la jeune fille. « Il ne faut pas me le demander deux fois ! Tu me connais trop bien, tu sais quoi proposer pour que j’accepte sans contrepartie ! » déclara le garçon d’un ton qu’il essaya de faire enjoué. Ce n’était pas qu’il n’était pas content de voir la blondinette. Que du contraire. Ce n’était pas non plus qu’il n’avait pas envie d’aller boire une tasse en sa compagnie pour prendre de ses nouvelles. Que du contraire. Il n’attendait d’elle qu’une distraction qui l’empêcherait de penser. De penser qu’il a perdu son meilleur ami, et perdu sa joie de vivre en même temps que son enfance.

James sortis les galions que le vendeur lui réclamait gentiment, puis récupéra dans un « merci bien ! » son petit paquet contenant ses nouveaux achats enveloppé de kraft marron tout aussi horrible que la couleur des tapis de la boutique. Les deux vieux amis rejoignirent le petit salon de thé dans le silence le plus complet.  Il faut dire que l’ambiance sur le chemin de Traverse était des plus glaciales. Pas à cause du temps. Le mois de Septembre bien que pluvieux n’était pas le plus terrible à affronter. Non, ce qui rendait l’ambiance si froide, c’était les regards à la dérobée. Les capuches cachant les visages des sorciers. Les pas précipités des passants. Personne ne tenait à rester dans les parages avec les derniers événements. Seuls les Seth continuaient à faire comme si de rien n’était. Non, en vrai, ils ne faisaient pas comme si de rien n’était. Non, ils se pavanaient. Se moquaient ouvertement des gens qui étaient jugés inférieur. Pas tous évidemment. Il y avait toujours des exceptions. Mais si peu. Trop peu. James n’avait pas tant à craindre. Il était un sang-pur dans le fond, bien que recalé au rang des Isis pour ses idéologies qui ne collaient pas à celle des Seth. Mais s'il ne faisait pas de vague, il pouvait se balader librement sans qu'on lui retire sa baguette ou qu'on ne l’envoi à Azkaban. De toute façon, il n’aurait pas voulu appartenir à la Caste des Seth. Ils étaient tombés d'accord là dessus avec Sirius, malgré le tatouage d’un serpent sur le bras, ils préférés cela à être un Seth, un être jugé comme mieux que les autres. Ridicule.

Une fois à l’intérieur, l’ambiance se réchauffa en une minute à peine. Trouver une place dans le petit salon à l’écart du reste des sorciers présents fut aisée à faire. Encore une fois, la rue et les boutiques n’étaient pas des plus fréquentés. James posa les yeux sur le tableau qu’il préférait du salon. Une nature sauvage. Un lac s’étendait au pied d’un volcan, des roseaux délicatement peints et quelques nénuphars par-ci par-là. C’était un tableau magnifique que James contemplait à chaque fois qu'il venait là. Plein de couleurs sombres. Pour un rendu étrange, envoûtant. Mais digne des plus belles œuvres de Michel Angelo. La serveuse prit leur commande. Sans grand surprise, James demanda un Earl Grey que le petit salon réussissait à merveille. Le péché mignon du garçon aux yeux couleurs chocolat. Attendant leur boisson, la jeune fille entama la conversation : « Alors que deviens-tu ?  Je n’ai pas eu de nouvelle de toi depuis un moment. »  Oui, c’était vrai. Ils n’avaient pas eu de nouvelles. James se demanda si ça se serait passé autrement. Si ces derniers événements n’avaient pas un peu précipité leur départ de l’école. Se seraient-ils tous promis de garder contact ? Aurait-il envoyé des hiboux à ses camarades, cherché à les revoir ? Il n’en savait rien. Un sourire un peu désolé sur les lèvres, James appuyant ses coudes sur la table répondit : « oui, j’ai pas vraiment prit le temps d’envoyer des nouvelles. Je suis assez occupé depuis la rentrée à vrai dire. Je me suis inscrit à l’école de médicomagie. Je suis Interne pour trois ans ! »  Puis désignant du menton le petit paquet qu’il avait déposé à ses pieds juste avant de retirer sa cape il ajouta : « c’est d’ailleurs des petites recherches personnelles ! Et toi, qu’est-ce que tu fais ? Tu as un travail ou tu continues à étudier ? »